Collaborer, apprendre et faire preuve de sensibilité
Beatriz, 33 ans, est espagnole. Pharmacienne avec MSF depuis 2016, elle nous raconte son expérience sur le terrain.
Quel est le rôle d’une pharmacienne chez Médecins Sans Frontières ?
En tant que pharmacienne chez MSF, mon rôle est très polyvalent. Mais, pour être brève, je m’assure que les patients aient accès à des médicaments et autres produits médicaux.
Il faut gérer le niveau des stocks pour éviter les pertes ou les ruptures dans les structures de santé, compiler les besoins pour assurer la réussite des programmes médicaux, tout en respectant un budget annuel et en servant d’appui technique aux équipes médicales (dosage, effets indésirables et pharmacovigilance). A cela s’ajoute une participation active dans la chaîne d’approvisionnement via les commandes internationales, la régulation par rapport à l’importation de certains produits ou l’évaluation du marché local pour l’achat des médicaments. Ce travail se fait en collaboration avec l'équipe pharmacie, l’équipe médicale et l’équipe en charge de l’approvisionnement.
Peux-tu nous donner quelques exemples de missions auxquelles tu as participée, de pays dans lesquels tu es allée ?
J’entame ma 5e année avec MSF et j’ai déjà participé à 5 missions : en République Démocratique du Congo, en République Centrafricaine, au Soudan du Sud, au Venezuela et je viens de rentrer d’une mission d’un an au Pakistan. A chacune de mes missions j’ai vécu de très bons moments mais aussi parfois des difficultés qui m’ont donné l’opportunité d’apprendre.
Généralement, combien de temps durent les missions ?
Entre six mois et un an, mais ça dépend de beaucoup d’éléments : le contexte, la disponibilité personnelle, les besoins de la mission, etc. Parfois, après 6 mois, je suis déjà fatiguée. Dans d’autres cas, même après un an, j’aimerais rester un peu plus longtemps.
Personnellement je trouve que la vie d’équipe est un élément primordial pour mener à bien une mission. Partager mes expériences avec mes collègues et aussi apprendre d’eux fait partie de mon propre apprentissage personnel.
Quels sont les autres professionnels avec lesquels tu collabores sur place ?
Je travaille en étroite collaboration avec beaucoup de profils médicaux : docteurs, infirmiers, psychologues, épidémiologistes, sages-femmes, techniciens de laboratoire… mais aussi avec l’équipe d’approvisionnement et la logistique. C’est le département logistique qui se charge d’aider les équipes médicales à trouver les médicaments sur place. Et puis, il y a aussi le travail collaboratif avec le département des Ressources Humaines (étant donné que je gère une équipe) et les Finances (pour les questions liées au budget).
Quelles sont les principales difficultés rencontrées sur place ?
Parfois on peut rencontrer des difficultés intrinsèques à chaque mission : contexte sécuritaire hors de notre contrôle et restrictions de mouvements, problèmes de langue et d’adaptation au contexte culturel. La chaleur ou les maladies endémiques peuvent aussi être un soucis. Quand on intervient sur une urgence, on doit parfois travailler sous une forte pression.
L’important est de savoir trouver des moments pour se reposer : pour le bien de l’équipe mais aussi pour soi-même. En règle générale, on vit avec ses collègues. Il est important de respecter les espaces de chacun au sein de la maison et être capables de déconnecter un peu jusqu’au lendemain. Dans toutes les missions, on trouve des manières pour y arriver.
On imagine que la maitrise des langues est importante…
Les langues sont très importantes. Dans la plupart des missions, l’anglais ou le français sont les langues parlées. Mais l’espagnol, le portugais et l’arabe sont aussi un atout.
Quelles sont tes autres activités professionnelles lorsque tu rentres de mission ?
Depuis que j’ai commencé à travailler pour MSF, je ne fais que des missions – je ne travaille pas autre part. Quand je rentre je prends un peu de temps (2 ou 3 mois) pour me reposer et passer du temps avec ma famille et mes amis. Il est important de connaitre ses limites personnelles, notamment pour reprendre des forces pour la prochaine mission. Certains de mes collègues font des missions de temps en temps et alternent un travail à la maison avec des missions.
D’après toi, quelles sont les qualités indispensables pour pouvoir travailler dans l’humanitaire ?
Le travail des pharmaciens demande des fortes compétences techniques, mais il faut également faire preuve de sensibilité par rapport au contexte. Il faut être capable de travailler en équipe et collaborer.
Qu’est-ce qui t’as donné envie d’exercer en tant que pharmacienne avec MSF ?
Après mes études universitaires, je me suis engagée auprès d’une une petite ONG espagnole qui m’a envoyée au Tchad pour soutenir le service de pharmacie d’un hôpital dans un contexte très reculé. J’ai tellement adoré cette expérience que j’ai pris la décision de poursuivre ma carrière dans l’humanitaire.
MSF est l’une des plus grandes ONG, dont je partage tous les principes. C’est pourquoi je continue à travailler pour MSF. C’est parfois très dur, mais c’est un des emplois les plus valorisants qui existent.