En 2016, Médecins Sans Frontières a déployé plusieurs bateaux en Méditerranée afin de secourir les personnes de la noyade. 19 708 personnes ont pu être sauvées. Nous vous présentons dix points clés pour mettre en lumière cette situation.
1. 2016 est l'année la plus mortelle jamais enregistrée
Depuis le 1er janvier, pas moins de 4 690 hommes, femmes et enfants ont perdu la vie alors qu’ils tentaient de traverser la mer Méditerranée, soit près de 1000 personnes de plus qu’en 2015, et l’année n’est pas encore finie.
2. Des bateaux de plus en plus en mauvais état
En 2016, les équipes de MSF ont secouru des personnes entassées dans 134 canots pneumatiques de très mauvaise qualité et dans 19 embarcations en bois.
3. Des passeurs plus cruels que jamais
Par rapport à l’année passée, nous avons constaté que moins de personnes disposaient d’un gilet de sauvetage, de nourriture, d’eau ou d’autres équipements pour le voyage, voire même d’une quantité suffisante d’essence.
Parmi les personnes secourues, certaines nous ont indiqué avoir été enfermées pendant des jours, voire des semaines, dans des caves, des tranchées ou des fosses avant d’être contraintes à embarquer sur un bateau et à prendre le large. Des récits horribles nous ont été rapportés, faisant état d’exécutions, d’extrêmement mauvais traitements et d’abus sexuels, voire même, dans certains cas, de torture.
4. Un grand nombre d'enfants non accompagnés traversent la mer
16% des personnes qui arrivent en Italie sont des enfants et 88% d’entre eux sont des mineurs non accompagnés.
5. Nous secourons beaucoup de femmes enceintes et nombre de grossesses sont le résultat d'un viol
Certains des bébés sont très désirés et arrivent tout simplement au mauvais moment, mais d’autres sont la conséquence d’un viol subi en Libye, durant le voyage ou dans le pays d’origine.
En 2016, quatre bébés sont nés à bord des navires de sauvetage de MSF. C’est un vrai miracle que leurs mères aient été secourues à temps et par des navires avec des sages-femmes qualifiées à leur bord. Nous n’osons pas imaginer ce qu’il se serait passé si le travail avait commencé plus tôt ou si elles avaient été secourues par des navires marchands sans personnel médical.
6. MSF n'aide pas les passeurs et nous ne sommes pas des passeurs
Soyons clairs : chez MSF, nous ne sommes ni passeurs, ni une opération anti-passeurs ! Nous sommes en Méditerranée purement et simplement pour sauver des vies. Les passeurs exploitent certaines des personnes les plus vulnérables au monde et leur trafic repose en partie sur le manque d’options sûres et légales pour rejoindre l’Europe. L’instabilité et la crise économique en Libye sont aussi un facteur majeur de prolifération des réseaux de passeurs.
7. Ce ne sont pas seulement les femmes et enfants qui sont vulnérables
Chacune des personnes que nous secourons a traversé des épreuves. Même si les femmes et les enfants ont des vulnérabilités spécifiques, les hommes ont aussi leurs propres difficultés, plus difficiles à cerner.
Certains fuient des guerres auxquelles ils ne veulent pas être mêlés, d’autres la torture, la conscription forcée et les violations massives des droits de l’homme ou encore la discrimination à cause de leur orientation sexuelle, la violence, la persécution, la pauvreté extrême et la destitution.
8. L'Europe est loin d'être la première destination des réfugiés et migrants
La grande majorité des réfugiés et autres migrants trouvent un refuge ou du travail dans leur propre région. D’après les données du HCR, aucun des pays accueillant le plus grand nombre de réfugiés ne se situe en Europe, puisqu’il s’agit de la Turquie, du Pakistan, du Liban, de l’Iran, de l’Éthiopie, de la Jordanie, du Kenya, de l’Ouganda, de la République démocratique du Congo et du Tchad. À eux seuls, ces pays abritent plus de la moitié de l’ensemble des réfugiés du monde.
9. Les réfugiés et migrants subissent de terribles violences et abus en Libye
Selon les personnes interrogées par nos équipes, les hommes, les femmes et les enfants – de plus en plus souvent non accompagnés, alors qu’ils ont parfois à peine huit ans – qui vivent en Libye ou y transitent subissent les mauvais traitements des passeurs, des groupes armés et d’individus qui exploitent le désespoir de ceux qui fuient le conflit, la persécution ou la pauvreté. Les abus signalés incluent des violences (notamment sexuelles), des kidnappings, des détentions arbitraires dans des conditions inhumaines, de la torture et d’autres formes de mauvais traitements, d’exploitation financière et de travail forcé.
10. Intercepter les embarcations quittant la Libye n'est pas une solution
L’expérience nous a appris qu’intercepter des navires surchargés qui sont à peine en mesure de naviguer peut être extrêmement dangereux dans ce contexte et peut aggraver les risques auxquels sont confrontées les personnes à la recherche de sécurité. Les individus qui fuient la Libye doivent être secourus de manière sûre et dans le calme, avant d’être conduits à un port sécurisé où ils recevront une assistance et pourront introduire une demande d’asile ou d’une autre forme de protection. Étant donné la situation actuelle en Libye, les ports du pays ne peuvent être considérés comme des lieux sûrs pour le débarquement.
MSF en Méditerranée centrale
En 2016, MSF a déployé des équipes à bord de trois navires, le Dignity I, le Bourbon Argos et le MV Aquarius (ce dernier en partenariat avec SOS MÉDITERRANÉE). Du début des opérations, en avril, au 29 novembre, ces trois équipes ont secouru 19 708 personnes qui tentaient de traverser la Méditerranée sur des bateaux surchargés, et ont aidé 7 117 personnes supplémentaires à rejoindre l’Italie, tout en leur proposant une assistance médicale. En Méditerranée, plus d’une personne secourue sur sept est aidée par les équipes de Médecins Sans Frontières.